L’organisation de défense des droits humains "Al-Haq" émet des doutes sur la version donnée par les autorités israéliennes après l’assassinat de Mohammad A’amsha et Anas Taha et cela suite à une série d’enquêtes menées sur le terrain où elle a recueilli plusieurs témoignages de témoins oculaires donnant des récits concordants dans une large mesure.
Ce doute, selon "Al-Haq", est motivé par le fait que dans les deux cas les deux victimes ne représentaient pas de danger réel et imminent pour la vie des soldats, et dans le cas de Mohammad A’amsha, le scepticisme est justifié car l’attaque présumée des soldats avec un couteau n’ a pas eu lieu et peut être juste un prétexte avancé par ces derniers pour justifier leur crime.
Cas de la première victime :
Mohammad Mustafa Bassam A’amsha, 25 ans, de kafr Ra’ai dans le district de Jénine, qui a été tué par des soldats israéliens au check point de "Za’atara" au sud de Naplouse, le 17 août 2015 sous prétexte qu’il a essayé de poignarder l’un des soldats. "Al-Haq" émet des doutes sur cette version des faits, d’ailleurs les nombreux témoignages recueillis auprès de témoins oculaires contredisent cette version des faits.
Dans son témoignage donné à "Al-Haq", l’ambulancier Jihad Khalil Abdul Hafeez Hamayel, arrivé sur les lieux du crime pour secourir la victime a souligné qu’il n’a vu sur place ni couteau ni autre instrument coupant, et son collègue qui était au volant de l’ambulance a reproché à l’officier de liaison israélien qui les accompagnait pendant le transfert du corps au camp de Hawara, l’assassinat du jeune Mohammad. L’officier lui a répondu que Mohammad portait un couteau, mais il est resté silencieux quand le conducteur lui a dit qu’il n’a pas vu de couteau sur les lieux.
En outre, un officier de renseignement israélien qui accompagnait une force armée pour perquisitionner dans la maison familiale de la victime au lendemain de l’assassinat a affirmé qu’il a une photo de Mohammad portant un couteau, mais a gardé le silence lorsque le père de la victime lui a demandé de lui montrer la photo en question.
Selon un autre témoignage donné par le conducteur Abdullah Awad A’adili à "Al-Haq", les forces d’occupation ont ouvert le feu de loin sur le jeune Mohammad, ce qui soulève des doutes sur la version donnée par les soldats israéliens et dans laquelle ils prétendent qu’ils lui ont tiré dessus après que ce dernier s’est approché d’eux et a brandi un couteau pour les attaquer.
Il est connu que toute la zone de ce check point est balayée par des caméras de surveillance, et sans aucun doute, elles avaient filmé la scène.
Cas de la deuxième victime :
Ibrahim Anas Mohammad Taha, 21 ans, du village de Kattana à l’ouest de Ramallah, qui en date du 9 août 2015, vers huit heures du soir a attaqué un colon israélien avec un couteau pendant qu’il gonflait ses roues de voitures dans la station de carburant " kaziat Khawaja" située sur la rue 443 près de l’entrée du village de kherbet Al-Misbah, mais le colon a réussi à s’échapper. Selon le témoignage de Hussein Ali Nezhi al-Khawaja, qui travaille à la station, le jeune attaquant est resté à proximité de la station après la fuite du colon.
Peu de temps après, deux soldats israéliens sont arrivés sur les lieux venant d’un check point à proximité de la station, ils ont discuté un moment avec les serveurs israéliens qui travaillent dans un restaurant attenant à la station puis ils sont partis. Le jeune homme était encore présent dans l’environnement de la station, ils ne l’ont pas abordé et lui n’a pas bougé.
Quelques instants après, un véhicule militaire israélien s’est présenté devant la station, les soldats se sont adressé aux serveurs israéliens du restaurant qui ont montré du doigt le jeune homme qui était encore assis à la même place. Les soldats sont sortis de leur voiture, ils se dirigent alors vers le jeune homme en criant en hébreu, celui-ci était à ce moment précis toujours assis, les jambes croisées et levant le couteau qui était en sa possession.
La distance qui le séparait des soldats est estimée par les témoins de vingt à trente mètres. Deux soldats ont tiré en l’air, et quelques instants après, un troisième soldat a tiré en direction du jeune Anas, le blessant mortellement, sachant que Anas n’a pas du tout bougé pendant toute la durée de présence des soldats, et même après quand ils ont tiré en l’air il est resté assis à sa place. Les forces d’occupation israéliennes ont affirmé qu’ils avaient tiré en direction de Anas pour l’empêcher de fuir.
La station d’essence est équipée de caméras de surveillance, les ouvriers de la station ont affirmé que des soldats israéliens avaient ouvert le dispositif contenant les images, tandis que le propriétaire de la station a affirmé que les soldats avaient confisqué l’appareil.
A l’issue de l’étude des différents témoignages obtenus suite à l’assassinat des deux jeunes palestiniens, où à chaque fois, les soldats israéliens prétendent qu’ils ont ouvert le feu après avoir été attaqués par ces derniers, « Al-Haq » est parvenu aux conclusions suivantes :
• Les deux victimes ne constituaient aucun danger réel et imminent pour la vie des soldats israéliens qui pouvaient dans les deux cas contrôler la situation sans recourir au tir à balles réelles. Mais supposons que ceux-ci ont constitué une menace sur la vie de ces soldats, ces derniers étaient en mesure de les neutraliser en tirant au pire sur les membres inférieurs ce qui évite de les tuer.
• Il est clair que la notion de danger imminent conformément aux instructions du tir à balles réelles est marginale et que les soldats sont prêts dans tous les cas à tirer sur les parties supérieures du corps dans le but de tuer et non pour prévenir un quelconque prétendu danger sans tuer.
Dans de nombreux cas, les soldats israéliens tirent pour tuer, même si la personne en face ne constitue aucun risque pour leur vie, c’est évident, ce qui est arrivé dans l’affaire de Anas Taha en est la preuve, aucune personne sensée ne peut-être convaincue par la version des soldats israéliens, citée plus haut, disant que Anas représente un danger et qu’ils lui avaient tiré dessus pour l’empêcher de fuir, comment peut-il être un danger pour des soldats lourdement armés, en étant assis à même le sol à des dizaines de mètres d’eux même portant un couteau ? Et même s’il voulait s’enfuir, il l’aurait fait avant l’arrivée des soldats, comment peut-on croire qu’ils lui ont tiré dessus pour l’empêcher de fuir.
• Dans les deux cas, à l’endroit du crime se trouvent des caméras de surveillance qui filment tout le périmètre et il est probable que ces caméras ont filmé les événements, alors pourquoi les autorités d’occupation ne montrent pas aux médias le contenu pour prouver la véracité de leurs allégations, surtout que la charge de la preuve incombe à l’occupant.
Traduction : Moncef Chahed